mercredi 3 décembre 2025

L'âge cahin-quinqua


Quand tu commences à dire que "tu as passé l’âge de ces conneries" ou "qu’on n’a pas à te dire ce que tu as à faire" ou encore que "c’est bon tu as suffisamment donné, il est temps de penser à toi", j’ai le regret (ou l’honneur) de t’annoncer que tu as sans doute basculé dans un âge cahin quinqua". Rassure-toi, ce n’est pas si grave mais parfois c’est mieux de le savoir pour éviter de passer pour un vieux beau (formulation féminine inexistante et c'est tant mieux), qui n’assume pas son âge ou qui se rend ridicule en essayant de paraître plus jeune avec l’usage d’un vocabulaire relou : "ça va les d'jeuns, on s’éclate ?" Tu as du mal à savoir si tu fais partie de cette catégorie cahin-quinqua ?  Laisse-moi t’aider, certains signes révélateurs sont visibles dans ton propre quotidien.

 

Commençons par tes nuits, quelle est la qualité de ton sommeil ? Tu es un homme : tu ne comprends pas, ta vessie a dû rétrécir car te voilà obligé de te lever plusieurs fois par nuit. N’oublies pas de chausser tes lunettes pour une visée optimale vers la cible, même si progressive rapport à tes verres. Tu t’éviteras ainsi des remontrances matinales de bobonne excédée. 

Tu es une femme : tu es sujette aux réveils systématiques à 2h47 qui se prolongent par une insomnie empreinte de sueurs nocturnes dignes d’une mousson tropicale.


Tu n’es peut-être pas concerné(e), mais pour certain(e)s d’entre nous, la grasse matinée est un souvenir plus que lointain : le réveil n’a pas encore sonné que tu as les yeux grands ouverts tel un lapin la nuit, immobilisé devant les phares d’une voiture. Toute tentative pour te rendormir est inenvisageable car vouée à un incontournable échec. Mais comme il est quand même trop tôt pour se lever, tu chausses tes lunettes et te munis de ton téléphone qui t’impose sur ton fil, des publicités plus que vexantes :  yoga sur chaise pour perdre du poids, complément alimentaires pour atténuer les effets de la ménopause, assurance obsèques et mutuelles en tout genre. Allez, tu finis par sortir du lit, et tu choisis pour cette journée une tenue "pratique" ou "confort": tu es mûr(e) pour voir ta boite aux lettres bombardée de prospectus Damart ou Mephisto. 

Tu t’apprêtes à partir mais tu ne sais plus où tu as mis ton sac ; tu t’agaces et tu jures à haute voix, parce que tu aimes de plus en plus parler tout haut même si tu es seul(e). Tu retrouves ton sac parfois dans un endroit improbable et c’est forcément que quelqu’un l’a déplacé sans t’en informer. Laisse moi te rappeler que cet argument ne tient pas la route si tu vis seul(e). 


En voiture, dès que tu passes devant un panneau, tu les déclames pour en faire profiter tes congénaires d’automobile, car ces informations sont exaltantes : "oh tiens, déviation à 100 mètres au prochain croisement",  "boulangerie artisanale au feu de bois ? c'est pas commun".


Au bureau, tu ne comprends pas tous les mots que tes jeunes collègues emploient : "J’tais en mode whaou, mais en fait, de base, mdr, c’est un charo qui fait tout en soumsoum". Parfois tu comprends leur humour mais pas tout suite et tu ris en décalé comme un mauvais duplex. Tu sors des vannes qui les offusque et tu leur lâches un : "de toute façon avec votre génération, on peut plus rien dire". Là tu es vraiment à la frontière de l’humour qui te vaudra en réponse : "Chuis choquée". Mais tu es un peu leur maman et ce rôle ne te déplait pas totalement, parce que comme elles savent te le dirent avec tellement de tact : "c’est un peu grâce à nous si tu restes jeune". Néanmoins, Tu ne comprends pas les vocaux au même titre qu’elles ne connaissent pas le répondeur.


Lorsque tu échanges avec ton fils, tu cumules de plus en plus ses réponses excédées du style : 

"Mais Maman tu me l'as déjà dit hier !

Toi en pleine crise de mauvaise foi : "Oui je le sais parfaitement mais je préfères te le répéter".


Quand tu rentres le soir et que tu t’affales dans ton canapé, tu émets un son vocal de satisfaction. Pour te relever tu en manifesteras un autre pour signifier que "la terre est basse". Tu es fatiguée alors qu’il n’est que 22 heures mais tu veux quand même avancer un p’tit quart d’heure sur ton nouveau puzzle de 1 000 pièces. 

 

Si tu évites les sorties en semaine, tu n’es pas contre un dîner au cours du week-end pour raconter à tes amis que tu as eu la chance d’aller voir la dernière pièce de théâtre qui s’appelle comment déjà, mais si enfin, tu sais, celle avec cet acteur super beau qui joue dans la série qui a fait un carton cet été et qui se passe en Bretagne enfin non, en Grande-Bretagne.

Le dîner se poursuit mais parfois les conversations parallèles te déstabilisent, le brouhaha t’indispose. C’est dommage, les échanges étaient captivants : à ta droite on parle de coloscopie, sur ta gauche la prostate fait de la résistance et en face, la bipolarité éveille les consciences. 

Tu ne rentreras pas trop tard parce que tu sais que sinon, il te faudra deux jours pour t’en remettre.  


Voilà, il existe certainement d’autres signes de l'âge cahin-quinqua, mais je n’ai pas la prétention de les connaitre tous et c’est peut-être un mal pour un bien. Et si tu ne cumules pas tous ces signaux, ne t’inquiètes pas, ton tour viendra ou pas . En attendant je connais pour ma part l'âge cahin- quinqua depuis maintenant 5 ans et malgré une description de signaux qui peuvent au premier abord effrayer, je partage à 100% l’avis de la célèbre  sociologue Florence Foresti : "50 ans c’est merveilleux, c’est l’adolescence avec une carte bleue".

mardi 14 octobre 2025

L' agence de rencontres : J'y vais ou j'y vais pas ?

 


Après avoir testé les applications classiques de rencontre qui ont pignon sur web (et c’est à se demander pourquoi), je tente à présent une nouvelle approche qui semble me correspondre. Mais avant toute chose, petit retour en arrière pour donner un peu de contexte. Profil classique de la Femme de 55 ans, célibataire depuis quelques années suite à un divorce plus que banal, bref la ménagère type. J’ai, comme beaucoup d’entre nous, été happée par l’appel des Meetic et autres manipulateurs d’algorithmes aux promesses de l’Amour fou mais en réalité totalement flou. Ce fut loin d’être un succès et j’en ai d’ailleurs sorti un témoignage (Mythiques rencontres). 

Que ces applications soient gratuites ou payantes, même constat : mensonges, déceptions, pauvreté des rencontres, agressions verbales ("salut sa vat ?"), sollicitations sexuelles non recherchées, éjections sans raison raisonnable… 

Au delà des comportements choquants auxquels nous sommes confronté(e)s sur ces applis, il y a parfois plus grave : la perte de confiance en soi, déjà ébranlée par une ou des séparations passées, puis ensuite assommée par la pratique devenue naturelle du ghosting qui parfois nous questionne sur nous-mêmes :"Qu’ai-je fait pour mériter ça ?"

Et puis cette technique qui consiste à sélectionner ou rejeter un profil par le scroll catalogue et la swipe attitude, parce que la photo n’est pas à notre goût ou que les quelques lignes de description sont tout sauf attirantes. 

Au contact de ces applis, je ressens une forme d’irrespect envers la nature humaine et finalement envers moi-même : non, je ne veux pas être assimilée à un simple produit de consommation, type camembert au lait cru, mis en tête de gondole pour favoriser l'achat.  

Bien évidemment, certains y trouvent leurs comptes ou même concrétisent un match, mais personnellement ça ne me correspond pas. Le concept du "Recherche long terme, ok pour court" est la preuve même d’un système incohérent que je ne cautionne pas. 

C'est aujourd’hui tellement facile de se créer son profil avec des phrases parfaitement séduisantes et des photos attractives, grâce au pouvoir de l’IA. S’il s’agit de trouver l’AA (Amour Artificiel), c’est peut-être la solution.


Force est de constater (et c’est plutôt rassurant), que ces applications ne sont plus seules sur le Marché et qu’une nouvelle tendance à l’approche plus humaine, que je teste aujourd’hui, grignote discrètement mais sûrement les mastodontes de la rencontre virtuelle. Je suis donc en relation avec une agence de rencontres, qui prend le temps des échanges pour bien cerner ma personnalité, qui choisit les mots justes pour décrire qui je suis et sublimer mes attentes. Cerise on the cake pour une quinqua limite feignasse, cette agence recherche pour moi la perle qui pourrait me convenir, en ayant pris soin de mesurer son indice de confiance. 

Je dois avouer qu'au départ malgré un échange téléphonique avec l'agence, j’ai hésité à concrétiser mon inscription. J'étais pourtant convaincue que c'était la formule qu'il me fallait, et donc bien décidée à y aller. Pourtant arrivée sur l'écran de paiement je n'ai pas validé dans l'immédiat pour de sombres excuses. Je crois que le sujet de la rencontre assistée par l'humain est source d'interrogations qui déclenche des prétextes pour repousser l'aventure.    


  • Prétexte 1 "Je ne suis pas prête". Prête à quoi exactement ? Ne s’agit-il pas en fait d'un alibi bidon qui cache une réaction de peur face à l’inconnu, dans les deux sens du terme :
    • la méconnaissance de ce concept d'agence qui sort de l’ordinaire parce qu'elle met la relation humaine au centre de ses préoccupations. Dites-moi que je rêve, je vais parler à des vrais gens ? Je vais me dévoiler sans passer par un questionnaire interminable parce qu'ici, je ne suis pas un simple numéro d'abonnée ? Tristement déstabilisant dans un monde où les machines remplacent les hommes...
    • et puis cet inconnu que l'on va peut-être rencontrer et qui risque de bousculer notre quotidien, nous mettre en zone d'inconfort, et perturber notre charge mentale régulièrement médiatisée. 
Face à ce type de prétexte, l’expression "se jeter à l’eau" prend tout son sens. Parfois, mieux vaut ne pas trop réfléchir : quel sentiment de fierté d’avoir sauté de 10 mètres : je me lance, je l’ai fait, et surtout je suis allée au bout de mon envie, je ne regrette rien.

  • Prétexte 2  "J'hésite, est-ce vraiment fait pour moi ? "Lors d’un date Meetic (ou mythique), un prétendant qui trouvait que je n'étais pas suffisamment amoureuse dès la première rencontre,  m’avait dit :"Sois plus décisive". Si la formulation n’avait rien d’une tirade à la Gérard de Nerval, elle m'a fait prendre conscience qu’il valait mieux ne pas tergiverser et privilégier sa première intuition (j'ai mis fin à notre date dans la minute qui suivit)  
  • Prétexte 3 : "Je n’ai pas envie de souffrir à nouveau". Pourquoi imaginer le pire ? Nos expériences passées ne sont pas une fatalité. La femme de 55 ans que je suis, est certainement plus aguerrie que celle de 27 ans en quête de son prince charmant, naïvement prête à faire des concessions pour le meilleur et surtout pour le pire. Avec les années qui passent, notre degré de tolérance à tendance à s'amenuiser mais veille à nous préserver.
  • Prétexte 4 "Je n’y crois plus". Mais en même temps, je reste addict des sites de rencontre et je gâche mes soirées : depuis mon précieux canapé, je tombe sur des profils de personnes déjà vues qui pensent probablement que sur un malentendu ça pourrait marcher… On démarre des conversations souvent sans intérêt, parce qu’au delà de la passion commune des maquettes en allumettes mise en lumière par les algorithmes, c’est le néant absolu. 
  • Prétexte 5 "Mon entourage amical est dubitatif". Corrigez-moi si je me trompe : ces amis sont généralement en couple ou n’ont probablement jamais été confrontés à la dure réalité des applis classiques ? Ils sont juste influencés par le matraquage publicitaire qui célèbre la diversité des histoires et la soi-disant authenticité des rencontres. 
  • Prétexte 6 "C’est trop cher". Pour avoir étudié la question, c’est souvent moins coûteux qu’un abonnement sur une appli, avec un service qui va pourtant au-delà de la simple mise en relation d'une personne compatible. Alors oui, c’est un investissement mais grâce à l’agence, je ne suis pas seule dans ma quête du Graal, je suis entourée de Love coachs dont l’esprit bienveillant et la lucidité renforcent ma confiance personnelle. Bref je me respecte et me sens respectée.

Et si actuellement je suis toujours en recherche, chaque rencontre proposée est riche de découvertes et m’aide à progresser dans l'affinement de mes propres attentes. Mes conversations régulières avec les coachs contribuent parfois à mettre fin à des certitudes sur ce que je crois vouloir. Et bien au-delà de tout cela, elles me font prendre conscience de ma valeur et de la chance que l'autre aurait, de faire ma connaissance. A bon entendeur...


vendredi 19 septembre 2025

"Out of Robert" ou "Robert le Magnifique"



On ne va pas se mentir, le prénom Robert en France a un côté has-been franchouillard qui ne vend pas du rêve érotique. Personnellement, je ne connais que deux "Robert" dans mon entourage proche et ils sont tous deux coincés, non pas dans mon soutien gorge (désolée), mais dans ma bibliothèque : Robert le dictionnaire et Robert Bidochon….A contrario, ce même prénom outre Atlantique est dans de nombreux cas, porté par une gente masculine possédant d’indéniables critères de séduction qui font parfois buguer les femmes un peu quinqua comme moi : Robert Wagner, Robert de Niro, Robert Redford.  

J’ai découvert Robert Redford en 1985, l’année de mes 15 ans et de la sortie du film Out of Africa. Je n’aurais jamais imaginé qu’une scène de shampooing puisse faire autant mousser… Et pourtant, lorsque Robert (dit "Denys"), au bord de la rivière verse précautionneusement de l’eau sur les cheveux de Meryl Streep, je sais que nous sommes des milliers à nous être imaginées dégager sans vergogne l’actrice de sa chaise, pour y prendre sa place : Meryl ou pas, même combat. 

On ressent puissamment le bien-être procuré par le massage du cuir chevelu qu’il pratique de ses mains forcément délicates puis la sensation rafraîchissante de l’eau ;  surtout après une journée banale, à gambader dans la brousse, faire écouter du Mozart à des singes, se payer une virée en avion privatisé et manger dans des couverts en porcelaine au beau milieu de la savane, en buvant du bon vin. Quel film ! J’ai dû le regarder une bonne demie douzaine de fois et il me fait toujours autant d’effet. En apprenant que France Télévisions le diffusait, je suis rentrée plus que fissa d’un dîner, pour ne pas manquer le shampouinage et l’après shampouinage … 

Dans ses films et dans ses interviews, Robert avait le chic pour nous aimanter de son regard aussi profond qu’un puit sans fond. 

En 1998, Dans L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, incarnant le rôle d’un dresseur, il est au comble de son potentiel de séduction : le simple port d’une tenue tout en jean, suffit à le rendre irrésistible et ce n’est pas Kristin Scott Thomas qui dira le contraire. Elle dût, "la pauvre", s’y coller lors de la scène où ces deux acteurs mythiques partagent une danse fusionnelle,  durant laquelle il aurait été impossible de glisser entre leurs deux corps soudés, ne serait-ce qu’une feuille de papier toilette. 

Et si l’on m’avait fait la "Proposition Indécente" de me réincarner en cheval, ne serait-ce que pouvoir bénéficier de ses murmures à mon oreille, je l’aurais accepté sans la moindre hésitation.


Robert Redford faisait indéniablement partie "Des gens pas comme les autres", un homme dont la présence dans ses films crevait plus que l’écran : il dégageait un côté rassurant tout en étant intimidant. C’était un condensé de beauté typique américaine, aux contours un peu carrés et qui faisaient craquer. 

Mais comme le disait Meryl Streep dans sa dernière réplique de Out of Africa : "il ne fut pas à nous, il ne fut pas à moi". La star hollywoodienne est à présent chez elle, au milieu des étoiles. 

mercredi 16 juillet 2025

Délic'YEU

 



Laissez-moi vous partager non pas la recette de l’indétrônable tarte aux pruneaux du marché mais celle d’une parenthèse de splendeur que je viens de déguster  durant le week-prolongé du 14 juillet.

- Prenez une traversée en bateau un jeudi en fin d’après-midi, en sélectionnant de préférence celle qui dure une heure et une pincée de minutes ; elle favorise pour les citadins dont je fais partie, la prise de contact en douceur avec l’air marin. La vitesse du bateau rappelle pour ceux qui savent, l’époque de "La Vendée" et de "l’Auguste Durand"… Apercevoir la forme quasi fantomatique de l’ile depuis les bancs extérieurs de "l’Insula Oya III", déclenche une excitation palpable chez les petits comme chez les grands, pour qui la perpective d’une pause insulaire, facilite la déconnexion. 


- Ajoutez tout au long du séjour un soleil radieux qui donne au ciel, maisons, plages et chemins de terre, des allures de superstars photographiées sans relâche par un fan club exponentiel et des professionnels qui captent l’Essentiel.


- Délayez avec un vélo qui vous emmène dans des chemins remplis de charme comme celui de la Détourne, libérant au travers de son parcours arboré,  un instant de fraîcheur bien mérité, ou bien, proche de la ferme d’Emilie, l’impasse du Chiron Durand, dont les champs déjà jaunis par plusieurs tranches de canicules, ont des allures de Savane.


- Admirez durant vos balades les multiples lauriers roses en fleurs qui s’épanouissent outrageusement, pour notre plus grand plaisir visuel, par dessus les courettes des maisons blanches qui parsèment les rues de l’ile. Observez au passage les boules des hortensias joufflus qui vivent à cette période l’apogée de leurs éclats. 


- Frottez entre vos mains un peu de fenouil sauvage, pour avoir la chance d’y associer peut être comme moi, le souvenir des premiers coups de pédales à deux roues sur les multiples chemins parfumés de cette "île aux enfants".


- Mélangez vos matinées avec vos activités préférées : un thé jasmin en terrasse sur le port qui se réveille, alors que les vacanciers commettent l’erreur naïve de prolonger leurs nuits. Ils laissent ainsi le précieux privilège aux islais de profiter sur le quai, d’une lumière sans pareille et d’un café bien serré avant d’embaucher pour la journée. 


- Mixez avec une virée vers la Meule, quand le soleil vient tout juste de se lever et qu’il propose à l’eau du petit port encaissé, des jeux de miroir colorés. Ecoutez le silence de ce lieu, agréablement perturbé par les goélands gueulards et des mouettes un tantinet rieuses.


- Ajoutez un incontournable passage à la Maison de la Presse, temple des férus de lecture qui grâce à une quiétude parfaite du lieu, laissent leurs yeux se délecter du choix du livre à acheter, sans voir le temps passer. 


- Saupoudrez de baignades aux Sabias dans cette eau translucide, dont le premier contact peut certes refroidir mais qui vous régalera après quelques poignées de brasses copieusement salées. 


- Assistez au spectacle de la brume envoûtante qui tel un magicien, fait mystérieusement disparaître en un temps plus que record, le Château du décor.


- Poursuivez à l’aide d’un thé glacé en bonne compagnie, à l’ombre de la terrasse de la Mission, pour qui la qualité de l’accueil et la tranquillité sont une formalité qui invite à revenir.


- En toute fin de soirée, en guise de digestif, préférez la balade à vélos par le chemin  de la Belle Maison. Arrêtez-vous en haut de Ker Daniau pour admirer la plage enfin lavée de toute présence humaine, éclairée par un ballon de soleil rougi par ses efforts. 


- Versez un soupçon de tristesse le jour du dit départ, tout en vous réjouissant d’avoir la possibilité de revenir fin août. Vous y grignoterez les dernières mûres sauvages baignant dans une palette de lumières uniques et caractéristiques des journées qui s’écourtent, en cette saison qui s’achève.


Merve'YEUsement vôtre

dimanche 6 juillet 2025

Va, vis et deviens



Watson mon fils,


Ça y est, c’est fait, tu as ton BAC. Pour découvrir les résultats, tu as voulu retrouver tes copains au lycée, histoire de vous soutenir en cas de besoin. J’aurais pu de mon côté, les consulter en ligne mais j’ai préféré que ce soit toi qui m’annonce le verdict. Ce moment t’appartenait quelle qu’en soit la tonalité, triste ou joyeuse.

Alors quand tu m’as appelée à midi pile et qu’au travers d’un brouhaha de sons typiques d’ados aux voix qui déraillent de leur voie de l’enfance, je t’ai entendu hurler à plusieurs reprises : « j’ai mon bac Maman, j’ai mon Bac », j’en aurais sauté de joie, comme sans doute des milliers de parents au même instant soulagés, et qui depuis leurs lieux de travail, laissent discrètement échapper une larme gorgée de souvenirs de leurs enfants.


Je peux te l’avouer maintenant même si tu le sais déjà, je n’étais pas vraiment sereine. Mais tu avais tout fait pour : alors que depuis Pâques, je m’acharnais à rentrer régulièrement dans ta chambre pour te rappeler l’importance des révisions, la vision de ton espace de vie était loin de me rassurer : toi d’abord, casque sur les oreilles, à réviser avec une assiduité qui force le respect l’option jeux vidéos en ligne. Quelques feuilles de cours à moitié chiffonnées sur un coin de ton bureau sous ton foutu clavier, ou par terre entre deux châteaux de fringues indistinctement propres ou sales… et quand le dimanche qui précède le début de tes épreuves, tu m’annonces que tu ne retrouves plus ta calculatrice, je frôle (seule) la crise de panique. Et puis le premier matin d’examens, alors que tu déambules au radar dans l’appartement sans laisser transpirer un soupçon de nervosité (sans doute en pleine méditation pour l’épreuve de  philo à venir), je me coince le dos en me brossant les dents…Nos attitudes extrêmes équilibrent parfaitement la balance de l’évènement.

Les jours des examens, je fais en sorte de télé travailler pour anticiper un éventuel problème de transport qui te ferait louper une épreuve (ce qui ne te déplairait pas forcément). Mon attitude te fatigue et tes réponses ont la tonalité de l’agacement :  « Oui maman j’ai ma carte d’identité et ma convocation », yeux en l’air et soupirs obtiennent la mention "Très bien" sans les félicitations de moi, ton jury.

Tu passes tes épreuves écrites avec un sentiment de réussite plutôt mitigé pour chacune d’entre elles, ce qui me laisse perplexe mais j’essaie tant bien que mal de ne rien laisser paraître. Tu reviens de ton grand oral agacé par des "questions débiles" et dont tu n’avais pas de réponses à formuler devant ce p… de jury non acquis à ton irrésistible charme. 

Alors quand tu m’appelles, je la verse aussi cette larme qui en plus d’avoir cumulé une dose de stress pour deux, contient des litres de souvenirs à commencer par cette FIV miraculeuse il y a presque 18 ans. Avec ce nouveau diplôme le chapitre de ta scolarité se referme : les punitions multiples comme les lignes à copier 50 fois "je dois être plus sage en classe", les commentaires des maitresses "Watson n’a rien d’autre à faire que dessiner sur ses cahiers, aucun travail en 1h30", sur plusieurs de tes bulletins, les appréciations pleines de bon sens quand on connait la direction : "plus de travail amènerait plus de résultats, la facilité n’est jamais bonne conseillère", tous ces vestiges écrits sont aujourd’hui de formidables pépites que tu prendras plaisir à lire à tes enfants d’ici quelques années. 


Je suis fière de toi Watson de tout ce que tu es, de ta nature profonde, de ton humour irrésistible, de ta maturité, de tes choix, de ce que tu dégages du haut de ton mètre 80 et de ta moustache (horriblement) naissante. Trace ta route et sois fier de ce que tu es. 

Va, vis et deviens.

dimanche 4 mai 2025

Un week-end haut perché ou comment voir la vie en rose




Dans son livre "Le Sel de la Vie", l’auteure Françoise Héritier traque toutes ces choses agréables qui ponctuent notre existence et dont les souvenirs nous émeuvent, en nous faisant prendre conscience de la valeur de chaque instant. De retour après trois jours délicieux passés dans le Perche chez une précieuse amie de longue date et avec sa Maman, j’éprouve cette irrésistible envie de poser par écrit ces instants privilégiés en petit comité, au travers de balades et de conversations multiples, dans une ambiance paisible aux senteurs de lilas.

Une chambre "avec vue", apaisante, dorée par un soleil généreux, avec cette délicate attention de déposer dans un vase, une branche de lilas fraîchement coupée pour l’occasion de ma venue,

Un vide grenier local qui anime un village le temps d’une journée, épaulé par une buvette qui ne désemplit pas et qui créée des envieux auprès des exposants, qui  en cette fin de journée, commencent à remballer,

Des agriculteurs dans leurs champs, qui ignorent le 1er mai et qui fêtent le travail au volant de leurs tracteurs,

Une dinette au champagne dont les bulles et les derniers rayons du soleil nous font pétiller de bien-être,

Un réveil en douceur par des oiseaux bavards que la nuit a brimés,

Un running matinal au travers d’une forêt bienveillante et d’une route champêtre qui parfois casse le rythme,

Une petit déjeuner aux saveurs de miel local qui s’abandonne sans vergogne sur du Poilâne grillé embaumant la cuisine,

Un instant de puzzle qui hypnotise le temps,

Des pages de lecture savourées sur un banc, éblouissantes au soleil et qui se tournent seules, à la force du vent, 

Une soirée aux allures de l’été, avec une grande tablée : des oncles, des tantes, des cousins, du vin et des saucisses grillées. Les discussions se croisent et les rires s’amplifient,

Un crumble aux fruits rouges qui débordent de son plat et laissent sur les rebords blancs, comme des traces artistiques d’une bougie consumée,

Quelque étoiles bienvenues dans un ciel de Normandie et des effluves de purin dont on se priverait bien,

Un petit tour au marché pour récupérer les indétrônables pâtisseries du coin commandées la veille, puis partager un verre en terrasse, au gré de nos rencontres imprévues,

Des promenades à pied où la cadences des échanges est plus rapide que nos pas, 

Une orage inattendu et des grêlons pas vraiment maigrichons qui s’invitent par le conduit de la cheminée 

Et puis au coin du feu, des discussion profondes sur les liens d’une famille et les épreuves de vies.

Un week-end qui s’achève avec ce sentiment de repartir regonflé par ces moments de partages d’exception où voir la vie en rose n'est pas qu'une expression mais une leçon de vie...

dimanche 2 mars 2025

Les "bails" relous #2 : le mec qui prend son temps à la caisse



J’aime à croire que l’agacement que je m’apprête à décrire et qui traduit une carence évidente en capital patience, ne touche pas uniquement les femmes sujettes à la (pré)ménopause dont j’ai la joie d’avoir rejoint le clan.  Cette situation se produit forcément le jour où l’on n’a vraiment pas le temps pour ces conneries, parce qu'elle risque de nous mettre en retard sur notre programme à suivre.

Je viens de finir mon plein de courses hebdomadaires dans ce supermarché plein à craquer du samedi et je fais donc la queue devant une des caisses depuis déjà une bonne dizaine de minutes, en espérant ne pas être en retard pour mon rendez-vous booké chez l'esthéticienne depuis des mois. Il ne reste plus qu’une personne devant moi, un homme d’une quarantaine d’années. Son caddie est bien rempli et je me fais la réflexion qu’un homme qui fait les courses, ce n’est pas encore très fréquent. Je suis donc plutôt admirative parce que lorsque que j’étais en couple, la question ne se posait même pas, c’était toujours moi qui m’y collais. 

Et puis le doute s’installe quand il commence à sortir un à un les produits pour les poser sur le tapis roulant de la caisse. Moi perso, je suis plutôt du genre pelleteuse, limite si je pouvais faire basculer le caddie directement sur le tapis, ça m’arrangerait. Alors que lui, non seulement il prend son temps pour les extraire un a un de son chariot mais en plus il les trie : le liquide avec le liquide, les produits d’entretiens ensemble etc… Là tu commences à te dire que ça va être long, très long. Tu as affaire à un psychorigide qui en plus, fait en sorte que les articles soient tous bien alignés les uns avec les autres. Et puis comme si ça ne suffisait pas : 

"Monsieur, vous avez oublié de peser les navets. 

- Ah bon, ça se pèse les navets ?"  

Dis, au lieu de discuter, décide-toi, tu les prends ou pas ? Lancent mes yeux Kalachnikov, ce qui ne sert strictement à rien car le personnage ignore totalement les clients derrière,  sauf quand il poursuit par une blague relou : 

"Quel navet je suis". 

A cet instant précis, pour mesurer son potentiel comique, il observe son auditoire pris en otage, en l’occurence la file qui patiente. Je suis face à lui, la bouche ouverte, je pense à une caméra cachée. Lui part peser tranquillement ses pu…de navets et revient tout aussi calmement 2 ou 3 minutes plus tard. 

Bien sûr pour ranger ses courses une fois scannées par l'hôtesse de caisse, c’est le même scénario : il les saisit un par un délicatement pour les mettre dans des sacs à contenu homogène : les fruits avec les fruits, le salé avec le salé. Ah merde il a fait une erreur, il a mis son pain de mie avec les articles d’hygiène. Je le regarde littéralement fascinée comme Thierry Lhermitte dans "Le Dîner de cons" : j’ai mon champion. II est seul au monde, vit dans la dimension du ralenti.  Il s’apprête à payer donc on est en droit de se dire qu’on approche de la fin du calvaire. Non, il cherche dans ses poches en flirtant*avec la caissière (*terme désuet mais tellement approprié au personnage), sort son portefeuille, tout en continuant sa discussion qui semble prioritaire : 

"C’est fou ce que vous avez comme monde en ce moment, ça doit pas être facile tous les jours". 

Mais barre toi connard !

il saisit une première carte dans son portefeuille, la regarde quelques secondes puis finalement la range pour en choisir une autre. Il indique à la caissière qui sait garder son calme (grand bien lui fasse) qu’il paiera un partie par carte et le reste en monnaie. Je suis subjuguée, parce que bien évidemment, il tarde pour sortir ses centimes qu’il a a du mal à trouver dans son porte monnaie en cuir qui date des années Goldorak. Et puis il s’en va sans un "merci" ni "aurevoir". 

C’est à présent mon tour. La caissière me regarde et me dit :

"C’est fermé vous n’avez pas vu la lumière rouge ? Nan j’déconne".