Et si on se faisait un petit bilan côté français de
ces trois premières semaines de coupe du Monde ? Hein ? Elle ne va
quand même pas nous refaire un billet sur le foot ?
Je vais me gêner !
Parce que oui, moi Charlie, j’aime le foot même si je ne suis pas fan du côté
bourrin auquel on assiste parfois sur le terrain et dans les gradins, quand ça
crache et rote à tout va, que les tacles sont un peu trop appuyés, et que les
maillots sont déformés par l’adversaire qui ne trouve que cette parade pour
stopper la dangereuse course d’un joueur.
Au lendemain d’un huitième de finale dantesque, à l’image
d’une météo de plus en plus chaleureuse, on commence à rêver au
Grand Bleu. Il y a dans l’atmosphère comme une mélodie qui nous rappelle 98.
Oui je l’avoue, j’ai douté comme beaucoup d’entre
vous ; j’aurais dû écouter mon fils Watson pour qui les premiers matchs ne
reflétaient pas le niveau de l’équipe. "Attends Maman, t'inquiète, ils se réservent
pour les grandes équipes." Il faut dire qu’avec France-Australie, y’avait
vraiment pas de quoi être fier comme un coq ; les kangourous ont failli se
mettre la victoire dans la poche... Sans
mari ni enfant ce jour-là, j’en ai profité pour vivre ce premier match
intensément en me concoctant un sandwich chipolata, beurre-moutarde,
accompagnée d’une petite bière forcément fraîche achetée pour l’occasion. Je ne
suis ni fan de bière et encore moins de saucisse, je ne sais pas ce qui m’a
pris. C’est sans doute ça l’effet foot : faut que ça mousse, qu’il y ait
du gras et du compact. Ne cherchez pas le ceviche ou la brunoise, ils sont définitivement
hors-jeu.
S’en est suivi France-Pérou et il faut bien l’avouer
même si la France remporte le match, c’était pas l’Pérou (désolée). Pour cet
évènement, la société dans laquelle je travaille avait installé dans la cantine
un écran géant. La Direction devait estimer qu’à 17 heures, heure du match, son
personnel était en droit de terminer sa journée de labeur, par un moment de détente
footballistique. Quelques paquets de chips disséminés sur les tables, des
cannettes de bière #sansalcoollafeteestplusfolle, une dizaine de drapeaux pour
décorer la salle mais l’ambiance n’y était pas, d’autant plus que la diffusion
s’est faite sans le son et un match sans son, c’est comme une girafe sans cou, c’est
impossible. Il faut entendre la clameur des supporters, les cris des joueurs et
les envolées parfois surprenantes des commentateurs.
Match numéro 3 : France-Danemark à 16 heures.
Bizarrement le dispositif cantine n’a pas été renouvelé mais certains petits
malins ont discrètement changé les chaînes des télévisions situées dans les
espaces dits de convivialité et censées diffuser en continue des informations
sur le Groupe… Tout occupée à réunioner,
je n’ai pu voir que dix minutes de match, temps suffisant pour mesurer que face au
Danemark, la France avait du mal à les trouver, les siennes de marques.
Côté plateaux télés, les commentateurs se
déchainent. Dans ce domaine, deux options s’offrent à nous téléspectateurs et
de plus en plus "trices". Vous êtes en mal de testostérone, vous
voulez que ça gueule, qu’on se coupe la parole, préférez le canal 21 et son équipe de
chroniqueurs aux looks parfois improbables et aux allusions grossièrement
répétées de la chatte à Deschamps, sa soi-disant baraka.
Pour plus de courtoisie et davantage d’élégance,
préférez Denis Brogniart, entourée de ses chroniqueurs et chroniqueuses
permanentes d’une émission sur l’autre, qui apportent fraîcheur et humour, bref une touche féminine qui
dédramatise et propose un nouveau regard sur un sport encore un poil (si je
puis dire) trop mec. Mais de là à envisager qu’un match puisse un jour être
commenté en direct par des voix féminines, je pense que malheureusement les
aigües dont nous sommes dotées sont incompatibles avec le récit d’un but en
direct…
Revenons à présent au huitième de finale face à une
Argentine décomplexée et majoritairement présente dans les gradins. Pour ce
nouveau match, le stress personnellement ressenti avant le démarrage était
comme la température extérieure, à la limite de la canicule.
Assise dans le canapé côté gauche, je me murais
dans une attitude prostrée alors que mon mari Sherlock positionné côté droite,
se lançait dans des prévisions exaspérantes : "ils vont perdre, ils font pas le poids devant Messi. Nan mais tu
te rends compte il a été 5 fois ballons d’or ! Ils vont se faire poutrer,
je ne sais même pas pourquoi je regarde". Je reste dans mon mutisme
mais je n’en pense pas moins. Le démarrage du match ne laisse aucun doute sur la
volonté de l’équipe française de montrer son talent et son envie d’aller plus
loin. Le Pénalty de Griezmann est une première bouffée d’oxygène vite étouffée
par la réponse argentine. Lorsqu’en deuxième mi-temps l’Argentine prend l’ascendant,
je me dis que ce n’est pas possible alors que mon mari poursuit son
raisonnement : "eh ben voilà qu’est-ce que je disais ?!". Alors
quand Pavard joue les justiciers tel un
Robin des bois ballons, je perds
le contrôle de mes molécules corporelles, bondis hors de mon canapé et
pousse un cri bestial. Pour le but d’Mbappé,
j’entame une danse exotique totalement improvisée sous l’œil je crois, effrayé
de mon mari. Et j’imagine que dans les cafés, fan-zones, gradins, on se saute
dans les bras sans forcément se connaitre ; c’est aussi ça la magie de la
coupe du monde, une espèce d’euphorie aux portes de la sphère intime.
Alors quand Mbappé dans son maillot moulé à la
perfection marque son deuxième but, Sherlock a muté lui aussi : "On
va les avoir c’est fini !!" Ah vous aussi vous avez noté le on
de la victoire, cette faculté de passer du ils en parlant
de l’équipe française quand ça ne va pas, au on quand le triomphe
est proche.
Le match se termine, on est en quart de finale ; Sherlock évoque la Messi Boulette et sa Messi trouille.
Je sors ensuite faire mes courses chez Carrefour, l’ambiance
est détendue dans les files de caisse, on se croise en souriant : "Allez-y, passez devant je ne suis pas
pressée".
Comme un air de 98…
Le lendemain, j’achète L’Equipe, ce qui ne m’arrive jamais mais j’ai envie de conserver le
côté MONUMENTAL d’un match réconfortant,
d’un match source d’espoir.
Certes il y a la victoire mais ce n’est qu’un
morceau de l’histoire d’une coupe du Monde qui déclenche des échanges, des
joies partagées dans un pays momentanément rassemblé. Profitons de ces instants, vibrons
et partageons nos émotions.
Bonne fin de coupe du Monde et…que le meilleur
gagne !