Première nouvelle





J'ai participé fin avril à un concours d'écriture organisé par le magazine LIRE et la société d'auto-édition LIBRINOVA.
Il s'agissait d'écrire une nouvelle avec comme "seule" obligation de commencer l'histoire par la phrase : "C'est en ouvrant ce livre que tout commença..."
Nombre de caractères : entre 16 000 et 20 000 soit environ 6 pages.
Le résultat vient de tomber et même si je n'ai pas été sélectionnée parmi les 590 participants, j'ai adoré cette experience, la constuction d'une histoire courte, la création de personnages que l'on a du mal à quitter lorsque l'on finalise le texte, le stress d'avancer dans la rédaction sans connaître la fin qui surgit du cerveau comme par magie au bon moment.
Si vous le souhaitez, mon texte est à votre disposition ci-dessous. Je suis preneuse de toutes critiques que vous pourriez émettre car je compte bien réitérer l'expérience en étant plus armée de vos conseils avertis.
Bonne lecture.



COMME DANS UN LIVRE OUVERT

C’est en ouvrant ce livre que tout commença.
Ce livre, Fanny l’avait repéré dans la bibliothèque du cabinet de conseil Ben and Partners dans lequel elle travaillait depuis 10 ans. Le principe de cette bibliothèque dédié au personnel était simple, y apporter les livres qu’on avait lu mais que l’on ne souhaitait pas garder chez soi par manque d’intérêt ou tout bêtement de place. La bibliothèque était située dans la Friendly Room  de la société, une salle entièrement dédiée à la convivialité avec son écran Plasma soixante-quinze pouces, ses fauteuils pouf anti position conventionnelle, un coin cuisine équipée pour préparer ses repas bio, vegan, voire même normaux, sa table pique-nique style aire d’autoroute pour un déjeuner forcément rapide, ses chaises hautes pour prendre de la hauteur, sa machine à café Nespresso pour s’imaginer Clooney. Alors quand Fanny passa devant la bibliothèque comme chaque matin, elle s’immobilisa en apercevant La pitié dangereuse de Stefan Zweig. Elle s’en était violement emparé en manifestant à sa manière son étonnement :
- Mais quel est le con qui se sépare d’un bouquin pareil ?

Fanny était dingue de lecture et appréciait particulièrement le style de Zweig pour son art inimitable et intemporel de décortiquer les émotions et ressentis de tous ses protagonistes.
- Le con c’est moi,  avait lâché Baptiste dernière recrue du cabinet, tout en se préparant son double Ristretto, sans même jeter un regard à Fanny. Depuis son arrivée il y avait maintenant trois semaines, l’ambiance entre les deux était quelque peu tendue en mode dobermann contre chat de gouttière. En qualité d’office Manager, Fanny était une super-assistante de Direction respectée par la vingtaine de consultants du cabinet tous légèrement plus jeunes qu’elle. Fanny, à 35 ans, était de toutes les réunions, responsable de l’organisation d’évènements, des réservations des billets de transports de l’équipe, du suivi des notes de frais, jusqu’à l’édition des bulletins de paye ; bref, elle connaissait chacun de ses sujets sur le bout des doigts. Son rôle évoluait entre la Maman complice veillant au confort maximal de sa progéniture et le Capitaine Marleau, notre Colombo féminin à la française, à la recherche du fin mot de l’histoire d’une note de frais quelque peu abusive. Les consultants la craignaient et la respectaient parce qu’elle était directe et sans faux semblant mais également parce qu’elle savait s’amuser et ne pas se prendre au sérieux. Fanny était quelqu’un d’entier et détestait le politiquement correct ; elle pouvait coller un uppercut verbal sans qu’on ait le temps de le voir arriver.  
Lors du premier jour de Baptiste dans la société, Fanny lui avait exposé son rôle et avait dit en plaisantant :
- Les notes de frais les week-ends, tu évites et la bouteille de Château Pétrus pour un client même important, tu oublies.
Baptiste était resté de marbre et lui avait volontairement tourné le dos, préférant poursuivre son échange avec le Directeur. Quel affront pour cette jeune femme qui avait ressenti son attitude comme une condescendance et un mépris distinctement affichés. Depuis ce jour, leurs échanges étaient à la limite de la congère et Fanny n’avait pas la moindre intention de provoquer un réchauffement climatique.
Le jour où Fanny récupéra le livre qu’elle n’avait jamais lu, elle tomba en l’ouvrant, sur un ticket Flash du Loto de la veille. En rentrant chez elle, son premier réflexe fut de  consulter sur sa tablette le site de la Française des Jeux tout en imaginant sans trop y croire… la liste de ses envies. Malheureusement point de vainqueur de la cagnotte à vingt millions d’euros cette fois-ci mais tout de même trois gagnants à  cinq bons numéros pour une somme de deux-cent-mille euros chacun. Son ticket faisait partie des chanceux.  C’est ce qu’elle réalisa après avoir comparé une bonne douzaine de fois ses propres numéros avec ceux mentionnés sur le site internet. Les instants qui suivirent furent une macédoine d’émotions contradictoires : joie, peur, excitation, stupeurs et… tremblements. Et puis s’en suivirent des idées qui s’échappent sans prévenir :
- une année sabbatique à faire un tour du monde à bord d’un combi Volkswagen. Fanny adorait les voyages même si les milliers de miles parcourus se faisaient principalement via Internet et grâce au cabinet Ben and Partners qui offrait une fois par an à son personnel, un voyage de motivation dit Incentive, aux destinations originales et surprenantes. C’est d’ailleurs elle qui avait la responsabilité de l’organisation de ces excursions, ce qu’elle affectionnait particulièrement. Du coup, elle se dit qu’un tour du monde serait optimal pour la rendre plus performante dans cette mission.
- En deuxième choix elle pensa à un investissement immobilier ou plus exactement à l’achat de l’appartement qu’elle louait depuis maintenant dix ans. La propriétaire, une amie de la famille, lui avait laissé carte blanche pour le rafraîchissement et la décoration des pièces. Et comme Fanny était plutôt calée dans ce domaine, elle s’était construit un petit nid douillet de quarante-cinq mètres carrés qu’elle ne souhaitait quitter pour rien au monde. Situé dans le neuvième arrondissement rue d’Aumale près de la place St Georges, le deux pièces était chaleureux et agencé avec originalité : tous les meubles provenaient d’objets chinés ou de sa propre création, comme sa table basse construite avec des palettes de marchandises repeintes et recouvertes d’une simple plaque en verre polie.
- En dernière idée, elle pensa tout simplement à un nouveau vélo car le sien montrait des signes de faiblesse. Or c’était son moyen de locomotion privilégié dans Paris y compris pour se rendre sur son lieu de travail, situé près de la Gare Saint-Lazare, surtout en cette période printanière.

Finalement sa liste était assez courte et sans excès. Il faut dire que Fanny se contentait de peu, aimait sa vie, même si elle côtoyait le célibat depuis maintenant deux ans. Sa dernière histoire lui ayant laissé un goût amer, elle n’avait pour l’instant aucune intention de repartager sa salle-de-bain.
C’était une jolie jeune femme aux traits réguliers mais qui n’en avait plus conscience suite à ses quatre années de vie commune avec un personnage jaloux, qui passait son temps à la dénigrer et à se moquer d’elle en public de préférence. Brune, les cheveux mi-longs, son regard porté par des yeux noisettes, était un mélange de malice et de douceur. Depuis sa séparation, elle faisait le strict minimum en termes de maquillage et de tenue vestimentaire parce que pensait-elle, cela ne lui apportait rien.
Alors que Fanny s’apprêtait à informer la terre entière de sa soudaine richesse, l’apparition répétée dans son champs de vision, de Baptiste en train de la fixer d’un air accusateur, l’en dissuada totalement. En fait oui, ce ticket se trouvait dans le livre de Baptiste. En toute logique, elle se devait de le lui rendre. Mais après tout, il n’avait qu’à se manifester non ? Fanny passa la soirée et la nuit entière à  se poser une seule et même question sans en trouver la réponse : devait-elle ou pas redonner le ticket à Baptiste?

Le lendemain matin en arrivant chez Ben an Partners, elle le croisa qui  l’interrogea :
- Tu as commencé La Pitié dangereuse ? C’est un bouquin en or tu ne trouves pas ? Dit-il en souriant et la fixant droit dans les yeux.
Fanny interpréta  cette remarque comme une provocation en référence au ticket gagnant. Elle devint rouge coup de soleil et partit se réfugier dans son bureau sans daigner lui répondre. Ah il voulait jouer, eh bien on allait jouer. Ce fut à cet instant précis qu’elle décida de se rendre à la Française des Jeux à l’heure du déjeuner pour récupérer SON gain le plus rapidement possible et sans aucun scrupule, enfin c’est ce qu’elle s’imaginait.
La séance de remise du magot et les conseils de l’équipe psy de la Française des Jeux furent un véritable supplice pour Fanny qui ne souhaitait qu’une chose, dégager pour encaisser ce bout de papier maudit le plus rapidement possible. Une fois le chèque récupéré et après avoir pris congé du personnel FDJ, sur le trajet du retour en métro, elle se sentit proche du malaise : l’annonce de l’accident grave de voyageur à la station Bonne Nouvelle lui parut être un mauvais présage. Elle était persuadée que tous les passagers de la rame la dévisageaient d’un air réprobateur. Dans la rue, elle avait la désagréable impression d’être suivie et que chaque personne croisée fixait son sac à main avec envie, tel un enfant devant une tartine de Nutella. Alors quand elle franchit le porche de l’immeuble dans lequel le cabinet Ben and Partners avait élu domicile, elle ressentit un immense soulagement, comme si elle venait d’échapper à Jack L’éventreur. A peine installée derrière son bureau et remise de son  flot d’émotions, quelqu’un frappa ; c’était Baptiste.
- Fanny je peux te voir un instant ?
- C’est urgent ? Parce que là vraiment, je suis débordée, dit-elle la tête dans ses dossiers brassant des feuilles dans tous les sens, sans le regarder bien évidemment.
- Plutôt oui mais je n’en ai pas pour longtemps ; j’ai bien compris que tes minutes étaient précieuses.
Encore un mauvais jeu de mots se dit-elle.
- Est-ce que tu pourrais me donner les conditions des avances sur frais parce que j’ai un  mois un peu compliqué et je pars en déplacement à Londres cet après-midi ?
Elle resta muette tout en le dévisageant, la bouche ouverte, les yeux figés comme un poisson suspendu à l’hameçon kidnappeur. Encore une fois il se jouait d’elle et voulait certainement la culpabiliser pour qu’elle avoue son délit.
- J’ai dit quelque chose qui ne fallait pas ? Bon écoute ce n’est pas grave, laisse tomber, je vais me débrouiller, je suis déjà à la bourre. On verra ça à mon retour.
Et il sortit du bureau sans qu’elle eut le temps d’émettre un quelconque son.

De retour chez elle, son premier réflexe fut d’extraire du bout des doigts comme un papier collant, le chèque de son sac et de le ranger au fin fond d’un tiroir pour ne plus y penser ; mais l’expression utilisée par Baptiste lui revenait en boucle : "j’ai un mois compliqué". Et elle venait de lui voler deux-cent-mille euros. Pour se changer les idées, elle essaya de se plonger dans La Pitié dangereuse. En fait c’est ça, elle avait pitié de ce garçon ! Décidément elle était trop préoccupée pour se laisser aller à la lecture.
- Allo Vanessa, il faut que je te parle. On peut se retrouver chez Mario ce soir ?
Vanessa était une ancienne du cabinet de conseil avec qui Fanny avait gardé des liens très proches. Régulièrement, elles se retrouvaient pour le temps d’un dîner au restaurant Le Bon Coin situé en face de l’immeuble de la société et devenu leur QG de ragots. L’inretraitable patron, passionné par son activité, les chouchoutait avec des assiettes spéciales filles à base de verdure accompagnée d’une farandole de fromages. Il leur réservait systématiquement un petit coin tranquille à l’abri de paires d’oreilles trop gourmandes.
Une fois l’histoire racontée à l’aide de quelques ballons de rouge, sous l’influence des paroles rassurantes de Vanessa, le sentiment de culpabilité ressenti par Fanny avait fondu comme une motte de beurre laissée en plein soleil. Mais il fallut que Vanessa consulte le compte Facebook de Baptiste pour semer à nouveau le doute dans la tête de Fanny.
- Dis donc il est plutôt beau gosse le Baptiste : musclé, bronzé, des yeux de ouf. Et regarde c’est un fan de voyages ! Il n’a pas l’air si con que ça ! Tu devrais creuser pour en savoir un peu plus sur lui non ? Et pourquoi tu ne le demanderais pas en ami sur Facebook ? Vas y passe-moi ton téléphone.
- Nan mais t’es dingue ! J’ai rien à voir avec ce mec !
Profitant d’une pause vessie de Fanny, Vanessa s’empara de son portable pour lancer une invitation Facebook.
Ce n’est que le lendemain matin en consultant son compte que Fanny eut la surprise de constater qu’elle et un certain Baptiste étaient désormais amis. La garce elle l’a fait pensa-t-elle. Non seulement il avait accepté l’invitation mais dans la foulée, il lui avait envoyé un texto par Messenger : "Je crois qu’il faut qu’on s’explique. Rendez-vous ce soir si tu peux à 19 heures Port de Solférino, péniche La Girouette".  Paniquée, Fanny contacta Vanessa pour lui demander une nouvelle fois conseil même si elle était obligée de faire le tri, Vanessa ayant une fâcheuse tendance à résoudre les problèmes par des solutions se situant en dessous de la ceinture :
- Vas-y, t’as pas le choix. Sois cash, dis-lui que tu n’as pas réfléchi, tu lui feras un virement et fin de l’histoire. Confonds-toi en excuses, joue-là Cosette ou Lolita, offre-lui ton corps.

La journée fut terriblement longue pour Fanny qui, devant son miroir, répéta sa plaidoirie encore et encore. Le soir venu, elle  se rendit en vélo au Port de Solférino, quai Anatole France.  Lorsqu’elle arriva devant la péniche La Girouette, elle fut surprise de constater qu’il s’agissait d’une habitation privée et non d’un bar flottant comme elle se l’était imaginée. Baptiste était sur le pont du bateau en train d’arroser les plantes  qui formaient un espace de verdure autour des chaises longues et de la table basse.
- Ah Fanny te voilà ; monte je t’en prie.
Baptiste était souriant, avenant. Et à y regarder de plus près, il était effectivement attirant. Mais là n’était pas la question, se raisonna-t-elle, et pour quelqu’un qui a besoin de tune, plutôt tranquille la vie sur la péniche, ironisa-t-elle intérieurement.
- Tu veux visiter ? Je te préviens, l’extérieur est beaucoup plus attrayant que l’intérieur. En bas c’est ambiance vide grenier baba-cool. Mes parents ont toujours eu le chic du mauvais goût aux tendances hippies.
- Tu vis avec tes parents ?
- Oui enfin non, mes parents sont partis neuf mois sur douze alors en leur absence, j’occupe le terrain. Je serais mal venu de faire la fine bouche même si je ne te cache pas que j’ai parfois envie de tout jeter par-dessus bord et de re décorer l’espace à mon goût.
Une fois encore, Fanny se reprocha d’avoir jugé trop vite. Baptiste n’était en rien plein aux as.
L’intérieur du bateau était effectivement un patchwork géant de couleurs plus criardes les unes que les autres : le canapé était recouvert d’un vieux plaid orange et mauve,  des tissus tendus aux motifs floraux étaient punaisés sur les murs en imitation lambris, la pièce principale parsemée d’objets de décoration en tout genre, là un sac à main en bandoulière sans âge, ici un éléphant d’un peu plus d’un mètre de haut en bois multicolore.
Une fois la visite terminée, Baptiste invita Fanny à s’installer à l’extérieur.
- Je te sers un verre ? J’ai fait des Spritz ça te dit ?
Baptiste avait préparé un superbe plateau de grignottis en tout genre : des crudités fraîchement coupées et disposées avec goût, des toasts de Tzatziki, un assortiment de tartelettes salées et de verrines confectionnées maison.
- Tu cuisines ? demanda Fanny qui décidemment allait de surprise en surprise avec ce garçon qui flirtait de plus en plus avec Dame Perfection.
- Oui surtout quand je reçois du beau monde répondit-il en souriant mais sentant Fanny troublée, il enchaina tout de suite :
- Ecoute, je suppose que tu as une petite idée de la raison pour laquelle je t’ai fait venir ?
Ca y est, on y est se dit-elle.
- J’en ai une vague idée mais il faut que tu saches…
- Non laisse-moi parler d’abord s’il te plait.
Son ton était autoritaire et la façon qu’il avait de la dévisager la mettait mal à l’aise ; son regard bleu perçant  avait un côté Anthony Hopkins dans Le silence des agneaux. Décidemment ce garçon était difficile à décrypter, tout l’inverse d’elle dont son entourage disait qu’on pouvait lire en elle comme dans un livre ouvert.
- Il faut que tu saches que j’accorde une grande importance à l’honnêteté ; c’est pour moi la base de toute relation. Or je pense que nous sommes depuis le début, partis sur de mauvaises bases dans le domaine.
Fanny se décomposait au fur et à mesure que Baptiste s’exprimait et elle n’avait aucune idée de la manière dont allait se dérouler la suite des évènements. Elle n’était plus certaine d’avoir le privilège de faire honneur à ce mini buffet dinatoire. En même temps, elle n’avait pas très faim.
- Tu as dû t’en rendre compte, je t’ai toujours évité au bureau. Contrairement à ce que tu peux penser, je suis d’une timidité maladive qui peut me faire paraître hautain. Et pour tout te dire lorsque je suis au bureau je me construis une carapace professionnelle car je ne veux tout simplement pas mélanger ma vie professionnelle et personnelle. Mais j’avoue que ton côté donneuse de leçons le jour de mon arrivée m’a un peu agacé. Mais lorsque j’ai trouvé ce livre sur une banquette de RER, je me suis dit que ce serait un moyen détourné de t’approcher car je t’avais entendu dire que tu adorais cet auteur.
- Attends une minute, tu as bien dit que tu avais trouvé ce livre dans le RER 
- Oui qu’est-ce que ça change ?
- Rien rien.  Et donc tu m’as fait venir ici pour t’excuser de ton comportement à mon égard ?
- Absolument c’est exactement ça ! Tu t’attendais à autre chose ?
A cet instant, Fanny aurait pu lui parler de la trouvaille du ticket de Loto dans le fameux livre. Mais elle préféra se taire, soulagée qu’elle était de ne plus se sentir coupable d’un quelconque vol : ce ticket appartenait certainement à la personne qui avait oublié son livre dans le train. Il n’y avait aucun moyen de la retrouver, fin de l’histoire, des scrupules et des remords. Elle était à présent légère, comme si on lui avait enfin décroché de son dos l’équivalent d’un cartable d’écolier de CM2 qu’elle trimballait jours et nuits. Elle le rassura en lui expliquant qu’elle de son côté, avait fait preuve d’une attitude distante liée à son plus gros défaut, celui de porter des jugements hâtifs et souvent sans fondement.

Le reste de la soirée fut un ravissement pour les deux qui échangèrent sur leurs passions communes principales, les voyages et la littérature. Pour des raisons différentes, ils semblaient avoir retrouvé le souffle d’une respiration normale qui leur avait fait défaut ces jours derniers et qui leur permettaient à présent de parler à cœur ouvert.
En fin de soirée, après s’être promis mutuellement de ne plus rien se cacher, Fanny remonta sur son vélo et prit la direction du 9ème. La nuit était particulièrement douce et Fanny pédalait avec entrain dans les rues de la capitale, transportée par une allégresse à la limite de l’ivresse. Une nouvelle vie allait s’offrir à elle grâce à cet argent tombé d’un livre mais également grâce à cette amitié naissante qu’elle envisageait déjà de faire évoluer en quelque chose de plus intime.

Alors qu’elle venait de se coucher, bercée par les souvenirs de cette soirée, son téléphone émit le bruit de réception d’un nouveau SMS. C’était Baptiste. Il ne peut déjà plus se passer de moi se dit-elle intérieurement avant de le lire :
"Ravi de cette soirée et que nous ayons pu jouer carte sur table.
Complètement oublié de te demander : j’ai joué au Loto cette semaine et je viens de me souvenir avoir rangé par inadvertance le ticket dans le bouquin de Zweig. Peux-tu me le rapporter demain  stp ? Passe une bonne nuit…"


2 commentaires:

  1. Bonjour,
    J'ai lu votre nouvelle dont j'ai bien aimé l'intrigue et le double rebondissement final.
    Je suis en réalité "retombé" dessus un peu par hasard mais je me suis souvenu l'avoir déjà lue au moment du concours.
    Bonne continuation.
    Cordialement,
    Emmanuel DAVID

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  2. Bonjour David,
    Ravie que vous soyez "retombé" dessus et merci pour votre retour.N'hésitez pas à vous promener sur mon blog et à y laisser vos impressions 😉😉
    Bien à vous
    Charlie

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