Monsieur,
Cher Monsieur d’Ormesson,
Pardonnez ma familiarité mais oui, vous m’êtes "cher" même si je dois l’avouer, mon attachement à votre personne est plus que très récent.
C’était il y a presque deux ans, lorsque je suis
tombée sur l’émission de Marc-Olivier Fogiel "Le divan". Avant
cela, "d’Ormesson" n’était
pour moi "que" le nom d’un
célèbre écrivain parmi tant d’autres, au regard particulièrement clair et dont
la voix prenait parfois des intonations surprenantes.
Cette émission m’a littéralement subjuguée,
captivée, à tel point que sur le moment, j’ai eu envie de vous écrire,
simplement, pour vous remercier, pour partager avec vous le bonheur de l’écriture,
de ces lignes que l’on comble, que l’on rature, qui nous saturent, et qui
finissent par provoquer en nous une joie débordante, étonnante, envoutante.
Mais je n’ai pas osé, trop de timidité. A quoi bon ?
J’étais totalement conquise par votre personnage :
votre sens du verbe, votre art de nous conter, votre à-propos à la citation, votre
élocution aux allures théâtrales, vos yeux "maliçaudacieux", votre visage
"parcheminé".
"Quoi ma gueule, qu’est-ce qu’elle a ma
gueule", seriez-vous capable de me répondre avec votre voix qui part
dans les aigus. Oui, cela ne vous a pas échappé, vous qui redoutiez de mourir
en même temps qu'une star (comme Jean Cocteau le même jour qu’Edith Piaf),
Johnny Hallyday a également fait ses valises. Mais avec l’élégance qui vous
caractérise, vous l’avez précédé d’un jour
et nous avez quittés ce mardi 5 décembre, comme Mozart. Tout est dit, vous êtes un génie.
Alors que les fans de Johnny siègent devant la
grille de Marne-La-Coquette, votre cercueil impérial, paré des couleurs de la France
est posé, là, au milieu de la cour des Invalides, muni d’un simple crayon à
papier : quel symbole dont vous êtes le demandeur. Tout autour, la
musique nous enveloppe, les paroles du Président raisonnent de justesse et de
délicatesse.
Vous étiez un remède, le baume du bonheur. Si
Johnny allumait le feu sur la scène, vous illuminiez les plateaux télé sur
lesquels vous étiez convié. Il suffit de regarder au second plan les visages
béas des invités, du public qui vous écoutent, qui attendent votre
anecdote, votre sens de la répartie et de l’autodérision. Vous êtes un
véritable mystère ; sous votre allure de vieille noblesse, vous respirez
la modernité. Vous prenez un malin plaisir à glisser dans vos phrases sagement
construites, des mots de notre époque, qui tranchent avec le reste.
A votre façon Monsieur d’Ormesson et sans doute à
votre insu, vous êtes une véritable star inter-génération qui pousse un chanteur
tout aussi brillant que Doré, à se faire tatouer votre nom sur le bras, ce qui vous surprendra et sans doute vous
touchera.
Votre hommage était national et non pas populaire. Vous
n’étiez pas Johnny et Johnny n’était pas Jean d’O. Cependant, à
bien y regarder et contre toute attente, vos points communs étaient multiples et
parfois étonnants :
- Vos yeux d’un bleu perçant
Que
ce soit le vôtre ou celui de Johnny, nous étions captivés par la puissance de vos
regards, dont la profondeur sans doute nous dépassait mais en tout cas nous fascinait.
- Votre tendance politique
Tous
deux vous penchiez indéfectiblement vers la branche droite de la nation, sans pour autant
critiquer de façon agressive, le parti opposé.
- Laurent Gerra
L’un comme l’autre,
vous êtes entrés dans le registre de cet imitateur pour notre plus grand bonheur ;
et grâce à lui, nous savons d’ores et déjà qu’il saura vous faire revivre.
- Votre allure
Si vous vous retranchiez derrière un style ultra
classique alors que Johnny passait de la paillette au costard noir sans le
moindre complexe, vous possédiez tous deux, cette élégance innée que l‘on prénomme "Allure".
- Votre voix
Pour
l’un chantée, pour l’autre parlée, vos voix nous ont bercés et nous ont
fascinés, chacune à leur manière.
- Votre goût de la séduction
Indéniablement
vous aimiez les gens, vous aimiez le contact et étiez parfaitement conscients
de votre pouvoir de séduction sans pour autant en abuser.
- Les mots de vos maux
Quand l’un écrivait pour nous conter sa vie et nous confier ses failles, l’autre préférait
les chanter, au beau milieu d’un stade.
- Sapin
Que le sapin de Noël qui ne possède pas a minima une
compile de Johnny ou un livre de Jean d'O, se fasse connaître dans les plus
brefs délais ou qu'il se taise à tout jamais.
Voilà, j’espère que vous ne m’en voudrez pas d’avoir
effectué ce parallèle mais vos départs successifs ont réuni tant d’émotion, de
respect et d’admiration, que l’ignorer aurait été une faille, un mensonge, un
oubli dans l’Histoire.
Et puis je suis certaine que de là-haut, vous aussi
avez apprécié la Johnny Hally-Day sur les Champs-Elysées. Je vous imagine
taper sur un tambour comme à l’époque du "Cercle de Minuit" mais cette fois, aux côtés de Gabriel ravi d'entendre les clameurs rock and roll, d'un refrain qui porte son nom.
Et là, j’aimerais tellement vous écouter me dire : "Oh mais comme tout cela est épatant !",
adjectif que vous chérissiez et employiez pour mon plus grand bonheur, à
chacune de vos apparitions.
Pour terminer, je préfère vous laisser la parole,
ou tout au moins, l’une de vos phrases dont vous seul aviez le secret : "Il y a
quelque chose de plus fort que la Mort, c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants."
Merci Monsieur d'Ormesson.
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