lundi 17 février 2025

Lettre à Violette Dorange

 



Chère Violette,


Alors que depuis quelques jours, malgré votre retour sur terre, vous subissez une nouvelle tempête mais celle-ci médiatique, tout s’agite autour de vous ; vous naviguez tout naturellement d’un plateau d’émission à un autre et surfez sur des vagues d’admiration qui parfois vous submergent. Comme pour le Vendée Globe, vous traversez cette première expérience avec une profonde humilité et semblez parfois flotter sur cette déferlante d’engouement qui vous dépasse. 

Invitée sur le plateau de "Quelle époque" avec Léa Salamé, vous faites dire à David Foenkinos cette phrase qui résume l’essentiel : "Je voudrais simplement vous remercier parce que vous nous procurez de l’admiration et ça nous fait du bien. On a besoin de héros et d’héroïnes donc grâce à vous, on se sent mieux aussi." 

A ma façon, je voulais également vous dire merci pour nous avoir partagé ces embruns d’enthousiasme, d’émotion, de détermination mais aussi de passion et de maturité. Vous avez enrichi notre sel de nos vies. 

Si j’étais votre mère je serais plus que fière et si j’étais la mer, je me serais extasiée devant votre comportement exemplaire face aux éléments d’une Nature parfois violente. Malgré la déception et quitte à perdre des places au classement de la course, vous ralentissez votre rythme pour maintenir le cap, celui d’aller au bout d’une aventure rêvée, depuis plusieurs années. 

Votre prénom Violette et Dorange votre nom, une identité propre qui cumule des couleurs d’arc en ciel souvent visibles en haute mer. La couleur d’une fleur qui rappelle la fraîcheur et qui dans ses significations, incluent la modestie. On ne peut qu’acquiescer tant votre discrétion et celle de vos parents vous honorent. Orange comme un soleil dont les rayons du soir, ont à plusieurs reprises fait pétiller votre regard pour le plus grand bonheur de tous vos followers. Confortablement installés dans nos salons chauffés, ou bien dans les transports, nous, "suiveurs" assidus, traquons régulièrement vos dernières vidéos. Elles agissent pour la plupart comme un remède anti-morosité. Malgré la solitude, les galères de réparations, les moments de stress et de fatigue, vous nous partagez votre mental d’acier et votre enthousiasme de tous les instants. Sur nos écrans de téléphone, vos deux billes marrons et votre irrésistible sourire nous font tous chavirer. Vous nous racontez la mer, vos rencontres inoubliables avec les albatros vos compagnons de route, les passages qui vous font rentrer dans l’histoire comme celui du Cap Horn. Vous partagez votre quotidien, vos repas déshydratés qui finissent par vous lasser, la découverte de vos cadeaux et votre coin photos. 


Dans votre salopette de skipper, minuscule point rouge au milieu de l’océan et seule maitre à bord de votre embarcation, votre entourage n’est jamais loin et vous apporte son soutien. Rien ne semble vous arrêter, pas même le moteur cassé. Votre esprit de compétition reste malgré tout intact et vous transforme en guerrière. Après Léon Marchand qui impressionne sous l’eau, vous, la plus jeune navigatrice du Vendée Globe, fascinez sur les eaux. 

Quand vers la fin du tour, d’une voix toute tremblante, vous racontez votre frayeur tout en haut de ce mat, malmenée par des vagues levées, nous mesurons votre courage pour éviter le naufrage. Il est temps de rentrer même si à quelques milles de l’arrivée, vous évoquez déjà la nostalgie de cette aventure unique.


Votre retour aux Sables-d’Olonne est tout aussi spectaculaire : cerné par des dizaines d’embarcations, votre bateau "DeVenir" semble glisser sur les vagues de la victoire et le réglage des voiles traduit l’osmose parfaite vécue pendant ces quelques mois. Sodebo et Mac Do ont tiré le gros lot ; à quand le Mac Dorange ?

Puis vous ralentissez, vous affalez les voiles, votre équipe monte à bord pour vous féliciter et vous laisse savourer votre arrivée grandiose de cette course mythique. Plus de 100 000 personnes ont fait le déplacement et vous acclament sans fin. Vous êtes hallucinée, et l’on lit sur vos lèvres des centaines de "merci". 

Vient le trop bref instant de Papa et Maman : des bras qui se resserrent, des yeux brouillés de joie, quelques mots échangés dans une flot de pudeur pour ne pas voler la vedette au public rassemblé. Nous partageons de loin, l’émotion de votre chère famille et admirons leur accompagnement dans l’accomplissement de vos rêves.


Le Vendée Globe s’achève mais votre détermination pour le projet DeVenir auprès de la Fondation Apprentis d’Auteuil, force aussi le respect. Après cette course en solitaire, vous êtes avant-tout solidaire. Depuis votre arrivée, vous donnez sans compter en toute simplicité, mentionnez votre équipe avec un enthousiasme permanent. Malgré cette soudaine célébrité, pleine de lucidité, vous gardez votre cap, celui de donner un sens humain à ce projet sportif, ce qui fait probablement de vous la première des skippers qui contre toute attente, souhaite avant tout garder les pieds sur terre…


Merci pour cette leçon de vie, de générosité.


Respectueusement.