mercredi 16 juillet 2025

Délic'YEU

 



Laissez-moi vous partager non pas la recette de l’indétrônable tarte aux pruneaux du marché mais celle d’une parenthèse de splendeur que je viens de déguster  durant le week-prolongé du 14 juillet.

- Prenez une traversée en bateau un jeudi en fin d’après-midi, en sélectionnant de préférence celle qui dure une heure et une pincée de minutes ; elle favorise pour les citadins dont je fais partie, la prise de contact en douceur avec l’air marin. La vitesse du bateau rappelle pour ceux qui savent, l’époque de "La Vendée" et de "l’Auguste Durand"… Apercevoir la forme quasi fantomatique de l’ile depuis les bancs extérieurs de "l’Insula Oya III", déclenche une excitation palpable chez les petits comme chez les grands, pour qui la perpective d’une pause insulaire, facilite la déconnexion. 


- Ajoutez tout au long du séjour un soleil radieux qui donne au ciel, maisons, plages et chemins de terre, des allures de superstars photographiées sans relâche par un fan club exponentiel et des professionnels qui captent l’Essentiel.


- Délayez avec un vélo qui vous emmène dans des chemins remplis de charme comme celui de la Détourne, libérant au travers de son parcours arboré,  un instant de fraîcheur bien mérité, ou bien, proche de la ferme d’Emilie, l’impasse du Chiron Durand, dont les champs déjà jaunis par plusieurs tranches de canicules, ont des allures de Savane.


- Admirez durant vos balades les multiples lauriers roses en fleurs qui s’épanouissent outrageusement, pour notre plus grand plaisir visuel, par dessus les courettes des maisons blanches qui parsèment les rues de l’ile. Observez au passage les boules des hortensias joufflus qui vivent à cette période l’apogée de leurs éclats. 


- Frottez entre vos mains un peu de fenouil sauvage, pour avoir la chance d’y associer peut être comme moi, le souvenir des premiers coups de pédales à deux roues sur les multiples chemins parfumés de cette "île aux enfants".


- Mélangez vos matinées avec vos activités préférées : un thé jasmin en terrasse sur le port qui se réveille, alors que les vacanciers commettent l’erreur naïve de prolonger leurs nuits. Ils laissent ainsi le précieux privilège aux islais de profiter sur le quai, d’une lumière sans pareille et d’un café bien serré avant d’embaucher pour la journée. 


- Mixez avec une virée vers la Meule, quand le soleil vient tout juste de se lever et qu’il propose à l’eau du petit port encaissé, des jeux de miroir colorés. Ecoutez le silence de ce lieu, agréablement perturbé par les goélands gueulards et des mouettes un tantinet rieuses.


- Ajoutez un incontournable passage à la Maison de la Presse, temple des férus de lecture qui grâce à une quiétude parfaite du lieu, laissent leurs yeux se délecter du choix du livre à acheter, sans voir le temps passer. 


- Saupoudrez de baignades aux Sabias dans cette eau translucide, dont le premier contact peut certes refroidir mais qui vous régalera après quelques poignées de brasses copieusement salées. 


- Assistez au spectacle de la brume envoûtante qui tel un magicien, fait mystérieusement disparaître en un temps plus que record, le Château du décor.


- Poursuivez à l’aide d’un thé glacé en bonne compagnie, à l’ombre de la terrasse de la Mission, pour qui la qualité de l’accueil et la tranquillité sont une formalité qui invite à revenir.


- En toute fin de soirée, en guise de digestif, préférez la balade à vélos par le chemin  de la Belle Maison. Arrêtez-vous en haut de Ker Daniau pour admirer la plage enfin lavée de toute présence humaine, éclairée par un ballon de soleil rougi par ses efforts. 


- Versez un soupçon de tristesse le jour du dit départ, tout en vous réjouissant d’avoir la possibilité de revenir fin août. Vous y grignoterez les dernières mûres sauvages baignant dans une palette de lumières uniques et caractéristiques des journées qui s’écourtent, en cette saison qui s’achève.


Merve'YEUsement vôtre

dimanche 6 juillet 2025

Va, vis et deviens



Watson mon fils,


Ça y est, c’est fait, tu as ton BAC. Pour découvrir les résultats, tu as voulu retrouver tes copains au lycée, histoire de vous soutenir en cas de besoin. J’aurais pu de mon côté, les consulter en ligne mais j’ai préféré que ce soit toi qui m’annonce le verdict. Ce moment t’appartenait quelle qu’en soit la tonalité, triste ou joyeuse.

Alors quand tu m’as appelée à midi pile et qu’au travers d’un brouhaha de sons typiques d’ados aux voix qui déraillent de leur voie de l’enfance, je t’ai entendu hurler à plusieurs reprises : « j’ai mon bac Maman, j’ai mon Bac », j’en aurais sauté de joie, comme sans doute des milliers de parents au même instant soulagés, et qui depuis leurs lieux de travail, laissent discrètement échapper une larme gorgée de souvenirs de leurs enfants.


Je peux te l’avouer maintenant même si tu le sais déjà, je n’étais pas vraiment sereine. Mais tu avais tout fait pour : alors que depuis Pâques, je m’acharnais à rentrer régulièrement dans ta chambre pour te rappeler l’importance des révisions, la vision de ton espace de vie était loin de me rassurer : toi d’abord, casque sur les oreilles, à réviser avec une assiduité qui force le respect l’option jeux vidéos en ligne. Quelques feuilles de cours à moitié chiffonnées sur un coin de ton bureau sous ton foutu clavier, ou par terre entre deux châteaux de fringues indistinctement propres ou sales… et quand le dimanche qui précède le début de tes épreuves, tu m’annonces que tu ne retrouves plus ta calculatrice, je frôle (seule) la crise de panique. Et puis le premier matin d’examens, alors que tu déambules au radar dans l’appartement sans laisser transpirer un soupçon de nervosité (sans doute en pleine méditation pour l’épreuve de  philo à venir), je me coince le dos en me brossant les dents…Nos attitudes extrêmes équilibrent parfaitement la balance de l’évènement.

Les jours des examens, je fais en sorte de télé travailler pour anticiper un éventuel problème de transport qui te ferait louper une épreuve (ce qui ne te déplairait pas forcément). Mon attitude te fatigue et tes réponses ont la tonalité de l’agacement :  « Oui maman j’ai ma carte d’identité et ma convocation », yeux en l’air et soupirs obtiennent la mention "Très bien" sans les félicitations de moi, ton jury.

Tu passes tes épreuves écrites avec un sentiment de réussite plutôt mitigé pour chacune d’entre elles, ce qui me laisse perplexe mais j’essaie tant bien que mal de ne rien laisser paraître. Tu reviens de ton grand oral agacé par des "questions débiles" et dont tu n’avais pas de réponses à formuler devant ce p… de jury non acquis à ton irrésistible charme. 

Alors quand tu m’appelles, je la verse aussi cette larme qui en plus d’avoir cumulé une dose de stress pour deux, contient des litres de souvenirs à commencer par cette FIV miraculeuse il y a presque 18 ans. Avec ce nouveau diplôme le chapitre de ta scolarité se referme : les punitions multiples comme les lignes à copier 50 fois "je dois être plus sage en classe", les commentaires des maitresses "Watson n’a rien d’autre à faire que dessiner sur ses cahiers, aucun travail en 1h30", sur plusieurs de tes bulletins, les appréciations pleines de bon sens quand on connait la direction : "plus de travail amènerait plus de résultats, la facilité n’est jamais bonne conseillère", tous ces vestiges écrits sont aujourd’hui de formidables pépites que tu prendras plaisir à lire à tes enfants d’ici quelques années. 


Je suis fière de toi Watson de tout ce que tu es, de ta nature profonde, de ton humour irrésistible, de ta maturité, de tes choix, de ce que tu dégages du haut de ton mètre 80 et de ta moustache (horriblement) naissante. Trace ta route et sois fier de ce que tu es. 

Va, vis et deviens.